Alpha42 - Entrevue avec Richie Mehta


Dans le cadre de la sortie du film I'll Follow You Down, @MarieLooper et @Szaz22 ont eu la chance de rencontrer le réalisateur pour discuter avec lui de son dernier film lors de sa première à Fantasia. Lisez leur critique du film ici. À noter : Richie Mehta étant ontarien, l'entrevue a été réalisée uniquement en anglais.

Voici donc une transcription en français de l'entrevue, écrite par @Szaz22.


Q : Où avez-vous trouvé l'inspiration pour utiliser la science-fiction afin d'expliquer la disparition de Gabriel ?

R.M. : Quand j'ai écrit le film, j'ai commencé par savoir quel serait le début : la scène de l'aéroport où Gabriel part. Je savais aussi la fin, mais je ne savais pas comment les relier. Cela ne faisait pas de sens. Alors comment faire en sorte que tout cela fonctionne ? Avec les voyages dans le temps. Je ne dirai pas la fin pour les gens qui ne la connaissent pas, mais la fin ne fait aucun sens sans les voyages dans le temps. La réaction de Marika à la porte ne fait aucun sens non plus. Alors c'est devenu la solution, et je l'ai incorporée à l'intérieur de tout le film.

Q : Dans le film, on voit plusieurs équations que le personnage d'Erol tente de résoudre. Est-ce qu'un physicien qui regarde le film penserait qu'elles pourraient être résolues ?

R.M. : Toutes les équations que les personnages disent et écrivent ont été écrites par un physicien et sont toutes impossible à résoudre.

Q : Wow ! Et avez-vous étudié la physique des particules pour rendre le film plus réaliste ?

R.M.: Oui, j'ai étudié les bases de la physique des particules et de la mécanique quantique, toutes ces choses-là.

Q : Pensez-vous que les voyages dans le temps pourraient devenir une réalité dans le futur ?

R.M.: Non. Je ne crois pas que c'est possible. Apparemment, ce qu'Einstein a dit est que ça serait seulement possible à partir du moment où c'est inventé, jusqu'au futur. Si nous l'inventions, aujourd'hui serait le plus tôt où nous pourrions revenir dans le temps, car il faut un portail, un deuxième côté au pont. Nous ne pourrions pas retourner plus en arrière qu'au moment où les voyages dans le temps ont été inventés.

Q : Est-ce que c'est ce que Gabriel voulait dire à Einstein dans le film ?

R.M. : Exactement. Il a réussi à retourner dans le temps et veut lui dire : « j'ai réussi, maintenant nous devons trouver la meilleure façon de nous en servir ».

Q : Si vous pouviez voyager dans le temps, vous iriez en quelle année ?

R.M. : Connaissez-vous Louis C.K., l'acteur ? Il est très drôle. Il a dit une fois que si vous voyagez dans le temps et que votre peau n'est pas blanche, vous serez dans une mauvaise situation. Si je retourne il y a 100 ans et quelqu'un me voit, ils me mettraient en prison ou quelque chose comme ça. Qui sait ? Mais personnellement il y a plusieurs ères que je voudrais voir. Je voudrais voir les années 30, l'époque médiévale en Chine et en Inde...

Q : Mais il n'y a pas d'époque que vous voudriez voir absolument ?

R.M. : Il y en a plein. J'aimerais voir le Far West, juste pour voir ces endroits. Par contre, j'aimerais vraiment voir le futur, car je suis curieux. Je suis un idéaliste qui espère le meilleur, mais je ne crois pas que nous nous en tirerons en tant que civilisation. Nous serons éventuellement détruits.

Q : Aussi, pourquoi Erol perd-il tout sauf son amoureuse ? Elle aurait pu tenter de se suicider comme Marika, mais elle ne va pas jusque-là. Pourquoi ?

R.M. : Souvenez-vous, quand il part, elle ne va pas bien. Je crois qu'à ce moment-là, il se dit : « Je me fiche de ce qui t'arrive, car cela n'arrivera pas. Je vais retourner en arrière et tout arranger. ».

Q : Car sinon il aurait échoué en tant que copain, en tant que fils.

R.M. : Oui, en tant que tout. Par exemple, si nous étions ensemble et que vous êtes triste, vous me demandez de vous tenir la main. Je dis : attendez. Je vais partir, vous laisser, afin de tout arranger et vous rendre heureuse. Car ce dont vous avez besoin se trouve là-bas.

Q : Admettons que nous changions la fin, que serait-il arrivé si Erol avait décidé d'accepter sa réalité plutôt que de la changer ?

R.M. : Je crois qu'ultimement il aurait été heureux. Des épreuves du genre arrivent tout le temps, que ce soit des fausses couches ou des suicides. Rien de ce qui se passe dans le film à ce niveau n'est pas déjà arrivé dans la réalité. C'est la vie.

Q : Mais les gens finissent par être heureux tout de même.

R.M. : Oui, et le monde est passé à travers pire, par exemple les génocides. Et les gens s'en tirent toujours d'une façon quelconque. Un autre film que j'ai fait en Inde, Siddharth : quelque chose de terrible survient dans le film.

Q : En fait, j'allais justement vous en parler.

R.M. : Oui, donc quelque chose de terrible survient et le personnage doit retrouver le bonheur, sans aucun voyage dans le temps. Ils doivent composer avec leur réalité.

Q : À propos de Siddharth, pourquoi le thème de la perte d'un être cher est-il récurrent dans les deux films ?

R.M. : En fait, je ne m'en suis pas aperçu avant d'avoir fini les films. Nous avons enregistré la musique des deux films à Londres avec le même compositeur, à une journée d'intervalle. Nous avons fait Siddharth la première journée, et I'll Follow You Down la deuxième avec le même orchestre. Ils ne connaissaient pas le scénario, mais uniquement la musique. Ils ont vu quelques extraits, quelques scènes à la télévision, et une violoniste est venue me dire « je crois que le film d'hier est à propos d'un père qui perd son fils, et que celui d'aujourd'hui est à propos d'un fils qui perd son père. » Je lui ai répondu : « Oh mon Dieu mais tu as raison ! ». Je n'avais pas fait le lien plus tôt. Ce genre de choses arrive...

Q : Avez-vous déjà pris des décisions qui ont eu des conséquences importantes pour vous ou vos proches ?

R.M. : Oui, je crois que nous en faisons tous. Je peux retracer plusieurs choix, par exemple peut-être est-ce que je n'aurais pas dû embarquer dans la voiture, ou peut-être aurais-je dû ? Je peux penser à tout ça et me dire que si je n'avais pas fait ces choix les choses seraient maintenant très différentes. Peut-être n'aurais-je pas dû dire oui, ou non... Je peux vraiment retrouver des points tournants spécifiques dans ma vie, mais je n'ai aucun regret.

Q : C'est bien. Et pour les prochaines années, quels sont vos projects ?

R.M.: Ce film sortira bientôt et ensuite Siddharth. J'ai aussi commencé à écrire un nouveau film qui se déroule encore en Inde, en anglais. C'est une progression par rapport aux deux autres. Des choses terribles s'y passent aussi, et il faut parvenir à trouver la paix.

Q : Alors c'est un peu votre quête de paix en films ?

R.M. : En quelque sorte. Je crois que c'est une façon d'inspirer les gens et de leur montrer que malgré les difficultés nous sommes au-dessus de tout cela. Nous valons plus que ça.

Q : Est-ce que ça sera un autre film de science-fiction ?

R.M. : Celui-là ne l'est pas, mais j'en écris encore un autre, qui sera sûrement un autre film de science-fiction. J'aime beaucoup ce genre.

Q : Donc ce sera une façon d'espérer voir un meilleur futur ?

R.M. : Oui. Pour voir un meilleur futur, ou pour mieux voir notre futur. C'est une façon créative d'examiner les choses différemment. Par exemple, le point de départ de Star Trek est d'observer les diverses cultures d'une façon différente. Les enfants peuvent le regarder, mais au fond c'est à propos de nous.


Q : Merci pour votre temps, c'est tout pour nous aujourd'hui.

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